Les soirées ARMD
Le 31 mars 2016, nous avons réuni 37 ophtalmologistes pour une soirée consacrée aux nouveautés de ce début d’année.
Par ordre de passage en scène :
Isabelle Aknin a présenté les résultats du protocole T à 2 ans.
Si le protocole T à 1 an avait montré une supériorité de l’Aflibercept sur le Ranibizumab (0,3) et le Bevacizumab pour le groupe dont l’acuité visuelle est inférieure à 5/10° (les 3 groupes avaient des résultats équivalents pour les patients dont l’acuité visuelle à l’inclusion est supérieure à 5/10°), les différences sont lissées à 2 ans. Seul le Bevacizumab reste inférieur aux deux autres, que ce soit en terme d’acuité visuelle ou d’épaisseur rétinienne. Pour le match Aflibercept/Ranibizumab, les résultats sont équivalents à 2 ans. La tolérance est similaire, avec des différences statistiquement significatives en faveur de l’Aflibercept, puis Ranibizumab (0,3) puis Bevacizumab pour ce qui concerne les APTC (complications cardiovasculaires), mais ce résultat doit être pondéré compte tenu du faible nombre de patients inclus (660 patients, alors que la base pour une valeur statistique des APTC est > 1000 patients). On peut garder à l’esprit:
1° que le Ranibizumab étudié est en 0,3, au lieu du 0,5 utilisé en France
2° une efficacité plus rapide de l’Aflibercept dans le groupe à acuité visuelle initiale inférieure à 5/10°, avec un amoindrissement des différences inter-molécules au cours du temps.
Stéphanie Baillif a fait une très belle présentation sur la rétinopathie diabétique périphérique.
Les études Rise Ride Vivid Vista et le protocole S du DRCRnet ont montré une régression du stade de la rétinopathie diabétique. Cependant plusieurs points sont à garder en mémoire:
1° dans le protocole S, qui comparait des patients sous anti-VEGF avec des patients traités par laser, les groupes étudiés sont complexes, puisque du laser était autorisé dans les groupes anti-VEGF, et que des injections étaient autorisées dans les groupes laser. Les conclusions de cette étude sont donc à pondérer.
2° la régression de la rétinopathie périphérique n’est pas une régression de 2 stades de notre classification SFD (anciennement ALFEDIAM) mais une régression dans la classification ETDRS qui comporte plus de stades, donc une rétinopathie proliférante peut reste proliférante, même s’il y a régression
3° cette régression ne concerne que 1/3 des patients traités mensuellement, 36 mois pour Rise et Ride, 24 mois pour Vivid et Vista Ce qui est très loin de notre pratique
4° que se passe-t-il à l’arrêt des anti-VEGF? une partie (du 1/3 initial) des patients ne rechutent pas. Ce qui veut dire qu’une partie de ces patients rechutent
la conclusion est que la pan-photo-coagulation reste d’actualité,à conclusion d’être bien faite: en passant d’impacts de 500µ à des impacts de 200µ, on se doit de multiplier les impacts: 3000 pour une pan-photo-coagulation bien conduite au lieu des 1200 conseillés avec les anciennes machines.
Florence Coscas a présenté les principes de l’OCT-A et les différences entre les instruments proposés à ce jour sur le marché. Puis elle a présenté des cas cliniques interactifs portant en particulier sur les signes d’activité et de quiescence des néovaisseaux. Les difficultés de diagnostic ont été clairement énoncés.
L’essentiel des belles images présentées par Florence Coscas étaient des images de l’appareil d’Heidelberg, encore en version beta. Cette version a un temps de capture de 90 à 120 secondes, pour des images larges de 20° à 55° centraux. Cela peut paraitre un peu long, mais l’analyse des images peut se faire en quelques clics avec une excellente qualité.
Il apparaît que l’OCT-A est un examen complémentaire, qui peut aider dans l’aire maculaire, mais qui ne peut pas remplacer l’angiographie classique: la périphérie n’est pas explorée facilement par l’OCT-A, les diffusions ne sont pas visualisées, certains instruments ne font pas la différence entre les zones de faible perfusion et les logettes…. De plus, nous devons toujours analyser l’OCT-A avec le repère OCT-B pour ne pas avoir d’artefact et d’erreur diagnostic. Pour l’instant, seul celui de Heidelberg possède un OCT-B angio mode .
L’OCT-A être un excellent redresseur de diagnostic en mettant en évidence un hypersignal de néovaisseaux en cas de CRSC ou de matériel pseudo-vitelliforme à condition de tenir compte des artefacts liés à l’effet miroir de l’épithélium pigmentaire et à l’effet écran de la choroïde.
Laurent Melki a présenté de très belles images d’OCT-A avec Angioplex, l’appareil de Zeiss. Il a ainsi montré un cas d’ischémie par occlusion veineuse, un cas de néovascularisation du diabétique, de polypes et de télangiectasies. Le temps de capture de cet appareil est rapide (12 secondes par pavé de 6×6 mm), mais actuellement il ne fait pas la différence entre perte de substance et œdème, et l’OCT B associé est de basse résolution. Pour couvrir l’ensemble de l’aire maculaire, plusieurs captures sont nécessaires, une mosaïque pouvant être reconstituée secondairement. Deux points ont été mis en lumière:
Le premier est que l’OCT-A peut donner des images similaires à celles de l’angio fluo et de l’ICG: les exemples présentés concernaient l’ischémie rétinienne de l’OVR et de la rétinopathie diabétique, dans certains cas la maculopathie diabétique, certains polypes choroïdiens à conditions de bien choisir les plans de coupes permettant de visualiser le réseau nourricier ainsi que les polypes et bien-sûr la DMLA néovasculaire. La principale différence est bien entendu l’absence de possibilité d’analyse dynamique d’un colorant, empêchant d’étudier les vitesses de perfusions des tissus étudiés ainsi que les phénomènes de diffusion.
Le deuxième point est l’intérêt spécifique de l’OCT-A qui vient de sa capacité à étudier la vascularisation normale ou pathologique dans les 3 dimensions. Comme cela a été montré, cela permet de distinguer une néovascularisation rétinienne d’une néovascularisation pré rétinienne dans le cas de la rétinopathie diabétique (l’angioplex de Zeiss permet une analyse du vitré), ce qui est impossible avec une angiographie traditionnelle qui ne donne que des images en 2 dimensions. Cela a un intérêt en pré-opératoire, par exemple en cas d’indication opératoire sur une rétinopathie diabétique proliférante (avec la limite due aux difficultés de faire l’examen en périphérie). Par ailleurs, cette analyse en différents plans est utile pour analyser certaines anomalies vasculaires comme les télangiectasies maculaires (une désorganisation du réseau capillaire superficiel temporal ainsi que du réseau profond ont été montrés sur un exemple) ou des anastomoses chorio-rétiniennes (où l’OCT-A semble avoir un intérêt indéniable).
Une sémiologie nouvelle va sans doute voir le jour, avec la nécessité de prendre en compte par exemple que la vascularisation choroïdienne peut apparaître parfois en hypo-signal (chez le sujet normal) et parfois en hyper-signal dans certains cas pathologiques comme en cas d’atrophie de l’épithélium pigmentaire ou semble-t-il (comme cela a été montré dans 2 exemples) sur certaines zones de fuites, en cas d’épithéliopathie rétinienne diffuse.
Le choix de l’appareil dépend de nos exigences en terme de qualité des images, de champ des images, de vitesse de saisie de l’examen et des possibilité de suivi lors des traitements. Une sémiologie précise doit encore être décrite avec: la localisation du plan de coupe, l’aspect des lésions, leur évolutivité, les modifications liées, par exemple, à l’œdème, aux exsudats, etc. Cette description sémiologique est l’un des sujets phares de l’ARVO et de la SFO cette année. Nous les retrouverons lors de la SFR qui aura lieu au cœur de la SFO lundi 9 mai à 14H00.
La soirée s’est terminée par un petit diner entre nous, qui a permis de poursuivre les discussion avant ces prochains rendez-vous.