Les risques de résistance aux anti-VEGF dans les œdèmes maculaires diabétiques
Biomarqueurs de la nécessité de passage à l’implant de dexaméthasone (Dex-i) pour le traitement de l’œdème maculaire diabétique (OMD) dans la pratique clinique réelle.
Une étude multicentrique.
Biomarker of risk of switching to dexamethasone implant (Dex-1) for the treatment of diabetic macular edema in real clinical practice. A multicentric study. Euretina 2024 Jeudi 19/9 15h20-15h25 Speaker Corner 3 – session Diabète et Maladies vasculaires
Jorge Ruiz-Medrano (Espagne)
1 – SIGNES OCT DE RÉSISTANCE
Cette étude multicentrique fait écho à l’étude Diademe, une étude espagnole sur l’IA présentée un peu plus tôt en session sponsorisée (Abbvie).
La question est la suivante : quels signes retrouvés à l’OCT (on dit « biomarqueurs ») permettent de prévoir une résistance aux anti-VEGF dans les œdèmes maculaires diabétiques (OMD) ?
Dans l’étude multicentrique (Espagne, France, Italie, Israël) rétrospective, donc « faite à la main », contrairement à ce qui sera rapporté plus bas, 275 yeux ont été analysés.
209 yeux (76%) ont dû passer des anti-VEGF à un implant de dexaméthasone. 66 yeux (24%) sont les yeux témoins ayant bien répondu aux anti-VEGF.
Méthodes
Étude multicentrique, rétrospective, de séries de cas chez des patients atteints d’OMD passés aux injections d’implants de dexaméthasone (DEX-i) après un temps de traitement par anti-VEGF dans la pratique clinique réelle.
Tous les patients ont subi un examen ophtalmologique complet et une imagerie multimodale (photographie couleur du fond d’œil et OCT).
Ont été analysés : l’âge et le sexe, le type de diabète, la durée du diabète, le type de rétinopathie diabétique, la durée de l’OMD.
- À l’examen : la meilleure acuité visuelle corrigée initiale (MAVC), l’épaisseur maculaire centrale (EMC), l’épaisseur choroïdienne sous-fovéale (ECSF).
- Sur l’OCT initial : le liquide (fluide) intra-rétinien (FIR), le liquide sous-rétinien (DSR), la désorganisation des couches internes de la rétine (DRIL), la désorganisation des couches externes de la rétine (DREL), les foyers hyper-réflectifs (FHR), les parois cystoïdes hyper-réflectives (CPHR), le kyste intra-rétinien dense (IRD) et les anomalies de l’interface vitréo-maculaire (IVR).
Les patients traités par injections anti-VEGF avec une réponse adéquate ont été sélectionnés comme groupe témoin.
Résultats
Les patients qui ont dû changer de traitement, avec passage à Dex-1
- Étaient statistiquement plus âgés, avec plus de femmes
- Présentaient une MAVC initiale plus mauvaise et une EMC plus élevée
- Une durée du diabète plus longue
- Un DSR
- Des lésions cystoïdes avec des parois hyper-réflectives (CPHR)
- Des kystes intra-rétiniens denses (IRD)
- Des anomalies de l’interface vitréo-rétinienne (IVR)
Dans l’analyse multivariée, les biomarqueurs les plus significatifs sont ; DSR CPHR et IVR.
En cas de présence de deux de ces facteurs, le risque de résistance aux anti-VEGF était dans ce groupe de 48,95%. En cas de présence de ces 3 biomarqueurs, le risque d’échec était presque de 100%.
2 – SIGNES OCT D’EFFICACITÉ
Dans la session sur l’intelligence artificielle (Euretina 2024 Jeudi 19/9 13h30-14h30), le professeur Aude Couturier s’est aussi intéressée à la prédiction d’une bonne ou mauvaise réponse au traitement, mais avec l’aide de l’IA.
Elle a évoqué l’étude Boréal, publiée en 2019 par le professeur Pascale Massin, étude observationnelle sur 3 ans, ayant confirmé l’efficacité du Ranibizumab 0,5 mg sur l’OMD.
Dans cette étude, on observe tout de même 39,5% de mauvais répondeurs.
Les biomarqueurs de bonne réponse aux anti-VEGF sont :
- Un fort taux de VEGF plasmatique
- Un DSR : fluide sous-rétinien récent
Les biomarqueurs de mauvaise réponse aux anti-VEGF sont :
- Des kystes intra-rétiniens > 250 µm
- Une épaisseur maculaire centrale importante
- La présence de DRIL
- Les points hyper-réflectifs
- Un DSR chronique
- Un taux sérique élevé de cytokines pro-inflammatoires comme les ICAM-1, MCP-1 ; IL 6 IL8 IL10, IL1b
Parmi tous ces critères, seuls
- Une épaisseur maculaire centrale importante
- Un DSR : fluide sous-rétinien récent
- Un fort taux de VEGF plasmatique
Sont des facteurs de mauvaise réponse à la dexaméthasone.
Toutes ces considérations devraient nous aider à choisir le traitement initial.
Par exemple, un DSR récent est compatible avec des anti-VEGF, mais un DSR chronique devrait nous pousser vers la dexaméthasone.
Une épaisseur maculaire centrale importante est un facteur de mauvais pronostic, quoiqu’il arrive. Devrait-on alors proposer un traitement combiné d’emblée ?
3 – QUE DIT L’IA ?
Pour finir avec cette session, Ursula Schmidt-Erfurth a présenté les résultats de son outil d’IA, pour l’instant réservé aux études : RetInSight
Elle insiste sur l’importance pronostique du fluide intra-rétinien.
Dans cette étude, elle note, entre autres qu’une fluctuation du fluide intra-rétinien mène à une baisse d’acuité visuelle, alors que l’épaisseur maculaire centrale a moins d’impact sur l’acuité visuelle.
Il faut donc s’inquiéter de la présence de fluide intra-rétinien, et ne pas espacer les injections tant que ce fluide est présent, même si l’épaisseur globale de la rétine diminue.
Nous discuterons de ces interprétations des OCT lors du prochain ARMD le 30 novembre.
RÉFÉRENCES
1 – Euretina 2024 Jeudi 19/9 15h20-15h25 Speaker Corner 3 – session Diabète et Maladies vasculaires – Jorge Ruiz-Medrano (Espagne)
2 – Session sur l’intelligence artificielle (Euretina 2024 Jeudi 19/9 13h30-14h30) – professeur Aude Couturier
3 – Ursula Schmidt-Erfurth a présenté les résultats de son outil d’IA, pour l’instant réservé aux études : RetInSight